dimanche 31 janvier 2010

Broadcast et Valerie

PAYSAGE D'HIVER - Kristall & Isa (Kunsthall / Cold Dimensions)

 

Quand j'ai découvert la musique de Paysage d'Hiver il y a 2-3 ans, je me suis dit : ça y est... le voilà le groupe de Black Metal le plus génial, le plus froid, le plus hypnotique, le plus "raw", le plus "culte"... bref LE groupe de Black Ultime (avec un grand U)... Un mec qui, sous le doux sobriquet de Wintherr, enregistre seul ses cassettes mystérieuses dans ses montagnes suisses glacées et qui par se faire, réinvente le True Black pour en faire quelque chose de résolument unique et magique, complètement propre à lui... Ma plus grosse baffe en matière de Black depuis mes premières amourettes dans le créneau (Burzum, quand tu nous tiens !). Malheureusement, à l'époque, je devais me contenter de vulgaires mp3s, vu la rareté des dites cassettes, éditées au compte-goute. Heureusement pour notre camarade misanthrope et donc pour nous, la quasi-reconnaissance (ça reste quand même plutôt underground) est venue avec l'entité Darkspace (autre groupuscule culte, œuvrant cette fois dans le Black interstellaire ambiant) et donc, la discographie complète de Paysage d'Hiver s'est vue gratifiée d'un passage au format CD et ce, de belle façon (magnifiques pochettes cartonnées, grandeur "boîte à DVD" pour respecter l'artwork originel des cassettes).


Sortie originellement en 2001, Kristall & Isa est le 6ème album du projet. C'est l'équivalent musical d'une ballade suspendue à travers une tempête de neige cosmique, magnifiquement irréelle, infiniment dense et violente. On flotte à travers ce froid, ce givre, ces flocons possédés par un vent rugissant... et on finit par se dire que personne d'autre n'existe, que la réalité n'est plus, que la planète Terre est un mythe, qu'il n'y a plus de monde extérieur à cette tempête magistrale. Il n'y a plus que la plainte d'un vent hostile crachant rafale sur rafale, l'onirisme de ces montagnes enneigées, la froideur de l'existence en ces lieux... Blasts crus qui "buzzent" jusqu'à en devenir des mantras incongrus, hurlements célestes, riffs narcotiques entrelacées dans la nuit des temps, batterie-hypnose, claviers à 40 degrés sous zéro qui tissent des passages ambiant aussi étranges que beaux... le tout porté par la magie croustillante et minimaliste du "lo-fi". Kristall & Isa est une autre réussite de Wintherr. Hypothermie musicale à l'état brut.


RICHARD SKELTON - Landings (Type)


-Janvier : Disque du mois-
 
L'engourdissement des matins brumeux... Ces jours flétris où l'hiver n'est que grisaille fantomatique... Ces matinées irréelles où le lever du corps s'avère difficile et où l'esprit, désincarné, voletant on ne sait où, n'intègre pas l'enveloppe corporelle. Ces jours-tombeaux où l'on se sent constamment hébété, la tête lourde, les pensées floues et vaporeuses, l'âme empreinte d'une inexplicable mélancolie... Comme si on était coincé à la frontière située entre deux mondes, l'un diurne et l'autre nocturne... l'un réel et l'autre chimérique... Vacillant sans cesse d'une dimension à l'autre... Errant dans notre Carnival of Souls personnel, jouant les figurants dans l'hypnotique Coeur de Verre de Herzog. Personnellement, j'adore me perdre dans ces moments tristes et beaux où l'on hante notre propre vie... où l'on se laisse porter par le long fleuve tranquille de l'existence et de l'inconscience.

Richard Skelton parvient à créer une bande-son parfaite pour accompagner ces moments contemplatifs. À travers une musique aussi splendide que nostalgique, mélangeant judicieusement l'ambient, le folk, le drone, le classique contemporain et quelques "field recordings", l'artiste britannique rend un vibrant hommage à sa femme, Louise, décédée en 2004. Ce qui ressort le plus de ce Landings ensorcelant, c'est un sentiment de tristesse résignée, le tout recouvert d'une ambiance spectrale, magnifique et bouleversante.


Dur de parler d'une musique qui n'est qu'émotion brute... Skelton, véritable peintre sonore empreint d'une sensibilité à fleur de peau, crée ici des toiles musicales abstraites qui invitent l'auditeur à un voyage intérieur des plus singuliers. À l'écoute attentive de Landings, on se perd dans des arpèges lancinants de guitare (souvent jouée à l'archet) qui flottent dans des nappes mélodiques diffuses, froides, minimales et tragiques... On se laisse percuter l'âme par ces cordes qui pleurent, suspendues dans un ailleurs incertain... par le chant épars d'une nature anglaise nordique qui s'intègre sublimement à travers l'œuvre... par ces bribes de mélodies distantes semblent provenir d'un passé lointain et assombri par des nuages opaques...

Richard Skelton nous livre ici un des disques les plus touchants et sincères d'une année 2010 qui ne fait que commencer. Un disque essentiel.

Vous pouvez écouter l'intégralité de l'album sur le site du label Type à l'adresse suivante :
http://typerecords.com/releases/landings

mercredi 27 janvier 2010

Sunn O))) dans une église !

INCROYABLE MAIS VRAI... et pourtant tellement logique. Quand j'ai écrit ma petite critique du dernier album de Sunn O))) dans mon Top 30 de l'année 2009, je ne pouvais m'imaginer que le groupe de Drone-Doom Metal le plus populaire de la planète avait réellement donné un concert dans la demeure de Dieu...

Le 26 Mai 2009 s'est tenue cette messe noire dans une magnifique église dominicaine (à Leuven en Belgique). Voici quelques scènes extraites d'un de mes plus gros fantasmes musical EVER !



I Love The Dead



Ceci est une histoire écrite dans mon cours de création littéraire à la session d'automne 2008. J'ai été pris par un désir soudain de juxtaposer les séries américaines Six Feet Under et Dexter (toute deux avec le même comédien principal).

L’histoire que je vais vous raconter commence au petit matin, alors que la phosphorescence flétrie d’un jour d’octobre occultait les ténèbres d’une nuit sans lune. Dans une grande maison de briques rouges, située à la croisée d’un cimetière brumeux et d’une forêt luxuriante, Samuel Trintignant s’éveilla. Après avoir assené quelques vigoureux coups de poings à son réveille-matin qui émettait un son apocalyptique digne d’une sirène d’avant-bombardement, Samuel sortit péniblement d’un sommeil chargé de rêves énigmatiques. S’ensuit une rigoureuse toilette matinale et un petit-déjeuner frugal qui se consomma sur la petite table de travail au sous-sol, à quelques pas d’une chambre froide qui abritait deux cadavres tous frais.

Le croque-mort ne chômait définitivement pas ces derniers temps. Ce matin, il devait travailler sur madame Béliveau, qui avait été poignardée à mort quelques jours auparavant. Du beau travail : trente-sept coups de couteaux, dont un dans la nuque qui lui avait été fatal. Le corps de Justine Béliveau, intégralement couvert de plaies plus ou moins profondes, ressemblait à un gigantesque morceau de gruyère qu’on aurait oublié trop longtemps hors du réfrigérateur. Bref, un dur travail de restauration en perspective… Et cet après-midi, ce serait au tour de Ronald Carpentier de se faire refaire une beauté. Le corps du vieillard, horriblement mutilé, avait été retrouvé l’avant-veille dans un conteneur à déchets d’un quartier malfamé. Son visage avait été abominablement brûlé à la torche, ses yeux crevés par des éclats de miroir et son pied droit allègement scié. Le pied en question avait été découvert dans une boîte postale à proximité de la scène du meurtre.

Habituellement, il aurait fallu plusieurs jours à un thanatopracteur pour redonner une apparence vaguement humaine à un seul de ces putrides défunts. Samuel Trintignant n’était pas un thanatopracteur commun. C’était un artiste, aussi expéditif que méticuleux, qui travaillait sur les dépouilles humaines comme un grand peintre jette son âme sur la toile. Peu importe le degré de décomposition ou la violence de l’accident qui avait mené à la mort, il créait de véritables chefs d’œuvres cadavériques. Plus le défi était grand, plus le résultat était époustouflant. C’est pourquoi en réalité, ce ne fut pas difficile de s’occuper de ses clients. C’est aussi pourquoi le centre funéraire « Trintignant INC » était si réputé dans la région.

Vers le milieu de l’après-midi, Samuel achevait les dernières retouches sur feu madame Béliveau. Il s’arrêta un moment pour savourer une cigarette à l’extérieur et ainsi s’imprégner de splendeur automnale. Octobre avait cet aspect miraculeux… La nature fondant tranquillement en beauté, la couleur des feuilles s’altérant majestueusement jour après jour, la lumière agonisant toujours un peu plus tôt chaque soir… et après venait Novembre, le mois des morts ; le cadavre gris terne d’Octobre qu’on avait perçu au petit matin, le lendemain d’Halloween. Samuel adorait particulièrement ce mois. Sa fête tombait le 1er et il chérissait l’atmosphère morne et funeste qui s’en dégageait. Novembre était son allié ; le reflet de son âme solitaire.

Samuel avait côtoyé la mort toute sa vie. C’était son champ d’expertise. Alors qu’il n’avait que six ans, sa mère périt en tentant de donner naissance à son frère mort-né. Peu de temps après, dans le sous-sol de la maison familiale, Samuel découvrit le corps de son père se balançant grotesquement au bout d’une corde. L’image du visage violacé et grimaçant de son géniteur s’imprima dans son esprit et ne le quitta plus jamais. Au lieu d’engendrer chez lui un traumatisme qui aurait été des plus compréhensibles, elle représentait pour lui un objet de fascination singulier.

Samuel partit vivre chez sa tante Adèle. Lorsqu’il eut treize ans, Adèle fut emportée par un cancer foudroyant. Placé en famille d’accueil, le garçon timide et rêveur ne réussit pas vraiment à lier de véritables liens affectifs avec ceux qui l’entouraient. Adolescent, il se découvrit une passion pour les dessins morbides, le Death Metal, les films d’horreur et la littérature fantastique. Il passait tout son temps libre à lire ou dessiner dans les cimetières avoisinants, y dormant parfois. À l’âge adulte, après avoir jonglé avec l’idée de devenir cinéaste ou médecin, Samuel décida de consacrer sa vie à sa passion. Une fois ses études terminées (avec brio), il ouvrit sa propre maison funéraire. À travers son travail, l’homme s’accomplissait pleinement dans son domaine d’intérêt. Il ne lui manquait plus qu’un hobby tout aussi fascinant. Dans cette optique, il fut donc logique qu’il se tourne vers le meurtre.

Les premiers homicides de Samuel étaient venus d’une nécessité purement financière. Le monde moderne était impitoyable envers les croquemorts. Grâce à l’avancement (et l’accessibilité) de la science médicale, à la pasteurisation, aux lois protégeant les faibles et les pauvres, aux vaccins, etc... Mourir était devenu une occupation plutôt exceptionnelle chez les gens ordinaires. Samuel, en bon capitaliste, avait décidé de créer la demande. La nuit, il s’introduisait sournoisement chez les gens et les étranglait avec tact et précision. Plus souvent qu’autrement, la famille du défunt rappliquait dans son bureau le lendemain et le contrat était signé en moins de deux ; le temps d’assister à quelques crises de larmes. Les coffres s’emplissaient de nouveau.

Par contre, notre thanatopracteur préféré pris rapidement goût à cette besogne immorale. Très habile dès le départ, il y devint aussi très créatif, variant ses méthodes et ses techniques selon la victime. Tuer était devenu pour lui l’art suprême. Il voyait en ses escapes meurtrières nocturnes une interminable partie de « Clue ». Une nuit, c’était le démembrement à la tronçonneuse dans le salon. L’autre, c’était l’éviscération au tournevis à tête plate dans la salle à manger.

Samuel adorait estropier ses proies, non pas par sauvagerie gratuite mais par défi personnel. Sachant qu’il allait travailler sur ces mêmes corps, il adorait s’infliger des contraintes artistiques. Sa dernière lubie, c’était la décapitation. Bien recoudre une tête sur un corps est une tâche extrêmement délicate mais quand cela est fait d’une main experte, le résultat en vaut la chandelle. Ces dernières « ré capitations » valaient toujours à Samuel des commentaires élogieux lors des services. Les madames et les monsieurs n’arrêtaient pas de sortir les classiques « Ah ! Vous nous l’avez bien arrangé ! » ou encore « Elle à vraiment l’air en paix ! »

C’est donc dans l’optique de faire rouler quelques têtes que Samuel sortit de chez lui cette nuit là, vers les deux heures du matin. Il avait fait du bon travail toute la journée ; c’était maintenant l’heure de se divertir un peu. Enfilant un costume sobre, entièrement noir, et agrippant sa trousse de travail qui contenait une hache bien affutée, notre « nécro-spécialiste » était fin prêt à seconder la faucheuse une nouvelle fois. Il prit sa voiture et roula calmement pendant une bonne heure dans les différentes banlieues de la cité, se laissant inspirer par les diverses demeures assombries… dans le but de choisir la bonne. Finalement, il découvrit la maison parfaite. Belle, grande, un peu en retrait des autres sur la fin de la rue… Elle avait ce cachet de « maison de film d’horreur ». Et l’horreur allait bientôt devenir réalité pour ses habitants.

Samuel se stationna à un bon kilomètre de la maison. Il empoigna son attirail et sortit de la voiture. Après avoir fermé la porte sans un bruit, il marcha d’un pas discret mais résolu vers le domicile. Dans la tête du psychopathe, le petit quartier nocturne n’était qu’un vaste cimetière et la maison au loin un tombeau immense qu’il s’apprêtait à profaner. Arrivé devant la porte, il sortit son passe-partout et en moins de deux se trouva à l’intérieur, dans l’obscurité totale. Il laissa ses yeux s’habituer à la pénombre et fit une visite rapide du premier étage. Cuisine, salon, salle de jeu, salle de bain. Les chambres devaient se trouver au deuxième. Le meurtrier emprunta alors le bel escalier de bois central qui menait à l’étage supérieur.

Ce qui se passa ensuite fut abominable... Quant tout fut fini, que Samuel eut rentré chez lui les habits et le visage maculés de sang, il s’écroula et se mit à pleurer pour la première fois de sa vie...

Après une fausse manœuvre dans l’escalier, la maisonnée s’était éveillée. La lumière s’était faîte et Samuel avait été confronté à une famille complète. Un homme, une femme et deux petites filles mignonnes qui venaient de sortir brutalement d’un songe espiègle peuplé de fées et de lutins. Tous des innocents. Les voir face à face dans le spectre électrique, vivants jusqu’à la moelle, apeurés mais unis dans la tourmente, purs devant Dieu… c’était trop. Il les avait trouvés beaux et tragiques. Son désir meurtrier s’était écroulé comme les empires d’un monde oublié. Et pourtant, il devait impérativement mettre fin à leur existence. Ils avaient vu son visage. Malgré les supplications nauséeuses de la mère, ils tombèrent un à un. Elle en premier, son front éclaté par l’impardonnable instrument de mort. D’un formidable élan de colère brute, le père s’était jeté sur lui en hurlant comme un animal indompté mais avait reçu la hache en plein dans la jambe droite… À deux pas du corps de sa femme, il gémissait, pleurait, implorait pour que Samuel épargne ses filles. C’était trop tard. Après avoir assisté au massacre de sa progéniture, le père émit un cri affreux, sorte de râle perçant qui secoua les fondations mêmes de la demeure. Samuel mit fin à ses tourment en laissant s’abattre l’arme sur son cou qui fondit comme du beurre. La tête de l’homme alla s’écraser grotesquement contre le mur le plus proche.

Samuel était paralysé, figé au beau milieu d’un tableau sanguinolent qui aurait trouvé sa place sur le mur du salon d’Edgar Allan Poe. Il resta là dix minutes, sans savoir quoi faire, jusqu’à ce que l’innommable vienne cogner aux portes de son esprit dérangé. La tête du père, qui dégoulinait de belle façon sur le plancher de bois franc, se retourna vers lui... Son regard fixa le sien et ses lèvres prononcèrent...

Quelques jours plus tard, on découvrit le croque-mort au bout d’une corde. Ses cheveux, qui une semaine plus tôt étaient d’un noir impénétrable, n’étaient plus que neige maladive. Il venait de terminer sa plus belle restauration à vie : une tête et un corps ré-assemblés à perfection... Curieusement, sur les lèvres du cadavre reconstitué, on pouvait apercevoir un sourire sinistre.




FIN

Le Black Metal et moi : un essai autobiographique



"Ce qu'il y a d'admirable dans le fantastique, c'est qu'il n'y a plus de fantastique : il n'y a que le réel."
[ André Breton ] - Extrait du Premier manifeste du surréalisme

"I believe the common denominator of the Universe is not harmony, but chaos, hostility and murder."
[ Werner Herzog ] - Extrait du film Grizzly Man

2001-2002 : Je suis un adolescent boutonneux à l'hygiène douteuse. Ma vie sociale quotidienne se résume à un seul pote (toujours mon grand ami) et mes parents. Je suis en secondaire cinq et ça ne va pas bien du tout. Sans réellement le savoir, je vis en fait ma toute première crise existentielle, le tout s'exprimant par une dépression sourde, agrémentée de crises d'angoisse et de désirs fréquents d'auto-anéantissement (yé !)... Renfermé sur moi-même, incapable d'exprimer ce mal-être à mes proches, je vis ces émotions troubles à travers la littérature et la musique... J'écoute alors surtout du Prog (Genesis, King Crimson, Gentle Giant, Van Der Graaf Generator, Harmonium), du Jazz (Miles & Coltrane) et du Frank Zappa (vous comprenez en partie pourquoi je n'avais pas d'amis)...

Sur un forum internet maintenant perdu dans la brume du temps, un usager (Vempyre était son pseudo - un chic type) me parle d'un style de musique on ne peut plus bucolique et ensoleillé... LE style de Metal le plus extrême de tous les temps... Une musique lourde, hypnotique, malsaine, belle et laide à la fois... Des guitares possédées, une batterie tribale, une basse inaudible et des vocaux qui sentent bon la souffrance et le dégoût... Des albums à la limite de l'écoutable, enregistrés dans le garage de chose... Des personnages burlesques qui se griment en version cadavérique des membres de Kiss et qui hurlent dans la nuit nordique... Des gens pas biens du tout qui forment des organisations satanico-terroristes, qui brûlent des églises pour s'amuser un brin, qui s'auto-mutilent et s'entretuent pour se distraire, qui vénèrent la faucheuse et le Grand Cornu (et même le plus célèbre architecte du 20ème siècle)... Face à cette mine d'informations insolites, je suis plutôt ambivalent quand à mon désir d'explorer tympanastiquement ce courant musical qui, à première vue, m'apparaît aussi ridicule que terrifiant (ok, j'étais très chicken à l'époque)... Mais la curiosité l'emporte et je télécharge (ouh ! le méchant mot !) quelques albums de Black Metal...

Révé-FUCKING-lation !!!!


Le Black Metal entre alors subitement dans ma vie et bouscule tout sur son passage pour devenir alors la bande son officielle de cette période noire de mon existence... Contrairement à bien des gens, je n'ai pas passé par la case "Metallica - Blaster of Muppets" (le "Dark Side of the Moon" du Metal... menant logiquement au Trash, puis au Death et finalement au Black). Je commence avec du vrai de vrai, du True Norwegian Black Metal : Burzum, Emperor et Enslaved. J'apprécie d'abord les deux derniers pour leur côté épique (n'oublions pas que j'étais une "Prog-whore" à l'époque). Emperor a un côté grandiloquent ("symphonies au casio") qui me plaît bien, tout comme les longues compositions psychédélico-vikings de Enslaved (King Crimson sur un drakkar !). Mais c'est surtout Burzum, le one-man band d'un certain Varg Vikernes, qui me jette le plus sur le cul. À la première écoute, je n'aime pas vraiment. Trop "tout-croche", trop morbide, trop flou, trop criard, trop malsain... Mais bizarrement, je dois être ensorcelé par les FORCES DU MAL™  parce que j'y reviens inlassablement. Il y a quelque chose d'étrangement euphorique dans cette quasi non-musique... à travers cette rumeur lointaine parvenue de la forêt agonisante... de cette voix moribonde qui gémit horriblement, crachant son fiel sur le pitoyable monde réel... de ce "buzz" incessant des cordes électriques qui nous monte à la tête comme une bouffée d'opium. Cette musique n'est qu'atmosphère, qu'émotion pure. Au même titre que la musique psychédélique des années 60, elle active le subconscient et incite au voyage ; à cet éternel périple intérieur qui, encore aujourd'hui, demeure une des choses que je recherche à travers la musique (se perdre dans une mer de sons pour mieux se retrouver après, la tête pleine d'images fantasques et divines).



C'est le début de mon addiction... Je suis junkie et le Black Metal est ma drogue de choix. J'achète d'innombrable albums (tout mon maigre argent de poche y passe) : Darkthrone, Mayhem, Ildjarn, Graveland, Immortal, Ulver, Abruptum, Summoning, Celtic Frost, Bathory, Marduk, Nokturnal Mortum, Arcturus et j'en passe. Je lis avec passion tout ce qui concerne l'histoire du Black scandinave et la mythologie qu'il y a autour : les meurtres, le fameux Inner Circle, les personnages plus grands que nature, aussi pathétiques que fascinants (comme Dead, chanteur de Mayhem, qui, selon les rumeurs, avait l'habitude d'enterrer ses vêtements dans des cimetières pour les imprégner de l'odeur de la mort ou bien de "sniffer" un corbeau mort qu'il gardait dans un sac ziploc juste pour se "mettre dedans" avant les concerts-cérémonies du groupe... Ai-je aussi mentionné qu'il s'est suicidé d'un coup de fusil en pleine tronche et que son bon ami Euronymous a pris une photo de l'après-scène pour en faire une pochette d'album ? Those crazy Norwegians !).



Je laisse pousser mes cheveux. Je fais des choix vestimentaires douteux. Je me crois nihiliste, alors que je ne sais alors pas vraiment ce que ça veut dire. Je prend de longues marches à travers la nature trifluvienne, privilégiant par le fait même cette activité onirique à mes cours de Cégep... Je vis, à travers ma passion pour le Black Metal, ma crise d'adolescence en retard... Je deviens beaucoup plus sceptique et critique (peut-être trop) par rapport aux humains et à la société qui les abritent. Je m'affirme enfin face à mes semblables, sans concession aucune. Mon modus vivandi est alors : "Les gens sont stupides et insignifiants et ce, jusqu'à ce qu'ils me prouvent le contraire". En ce sens, mon périple à travers la socialisation s'opère avec une mauvaise foi évidente mais au moins, il s'accomplit (je tiens à préciser que j'ai beaucoup changé depuis et ce, pour le mieux... ou du moins, je l'espère).

300 albums de Black plus tard... J'ai jeté mon crayon à paupière noir (grand dieux !). Mes passions musicales sont maintenant on ne peut plus vastes (de Roy Orbison à Grouper, en passant par la case Morricone) mais le Black Metal reste un de mes styles musicaux préférés (au grand déplaisir de ma copine, ceci dit). Et ce n'est pas une vulgaire passion de jeunesse à laquelle je m'accroche. C'est un amour authentique et pur ! Il y a tout dans cette musique. Des émotions brutes, non filtrées... Du beau, du laid, du tragique, du mélancolique, de l'horreur, du surréalisme, de l'absurde, de l'insensé, du somptueux, de l'abstrait... Et contrairement aux apparences, le Black, tout comme le Punk, est loin d'être un genre musical centré sur lui-même. Il est évolutif et malléable. On peut l'apprêter à toutes les sauces (voir le nombre immense de sous-genres inhérents au Black... c'est pire que le Jazz ou le Classique). S'agit de bien reproduire l'étincelle magique : ce "buzz" si caractéristique du Black (cet impossible nuage d'insectes "lovecraftiens").

Cette grande diversité peut s'entendre dans la musique du groupe américain Wolves In The Throne Room (qui combinent allègrement Black atmosphérique à la Burzum et Post-Rock), des Suédois d'Abruptum (Chaos vaguement musical : Lautréamont mis en musique, en cris et en notes de piano damnées) et de Lifelover (Ian Curtis de Joy Division en corpse paint), des Anglais de Anaal Nathrakh (Mariage intéressant entre Grindcore et Black) ou encore de l'Australien Sin-Nanna qui, sous le couvert de Striborg, fait jaillir milles fantômes à travers une musique aussi dadaïste que psychédélique, toute en réverbérations kaléidoscopiques.

Bref, j'aime le Black. J'aime son ambiance. J'aime ses acteurs. J'aime son folklore.

Sur ce, je vous laisse sur ces quelques morceaux-clés ayant fait de moi un fan invétéré :














dimanche 24 janvier 2010

Les Jours Mourants


 
 
 

 
 

*Je suis le seul propriétaire de ces images parce que c'est comme ça bon.

vendredi 22 janvier 2010

ScHiZoPhReNuS pRoFoNdIs #1 (La Moustache de Yanni : The Musical)

Une attaque terroriste et passablement incongru
(contre vos sens)
d'une colonie de berlingots de laits vampiriques
armés de lances-roquettes en fantex mauve
(OU les multiples divagations nocturnes diverses de votre très cher comparse Salade d'endives).



Inspirations :
la vie courante
l'eau courante aussi
les danseurs de merengue (surtout ceux qui sont violents)
les annuaires téléphoniques
les centrales hydro-électriques
les drakkars
le premier verre de jus le matin (c'est extrêmement rafraichissant)
les portemanteaux
la nature humaine (particulièrement celle des unijambistes)
les sapins de Noël
les Ewoks
Super Timor
Salvador Dali, Luis Buñuel, Alejandro Jodorowsky, Boris Vian, Eugene Ionesco, Normand l'Amour, David Tibet, Erik Satie, Klaus Kinski, Ma Colombe est Blessée, Hergé et les BD de FreD


-------------------------------------------------->ceci n'est pas une ligne mais elle essaie quand même

Le jour de son anniversaire de naissance, ce fut sa fête
Steve Perry, jeune homme de 23 ans dans la trentaine, célébrait demain son 27ème anniversaire. Mais ce grand moment était plus qu'une belle journée puisque que le surlendemain de l'avant-veille (c'est à dire le même jour), il fêtait sa naissance. "Wow ! 25 ans ! Et deux fois la même journée en plus ! Je suis tellement heureux ; je pense que je vais mordre un pissenlit !" déclara le jeune Perry, qui venait tout juste de commettre un vol à main armée dans un restaurant miteux de la ville de Détroit.

ÉCHANGERAIS vaches-limousines enregistrées avec ou sans veaux, contre édition sans reliure du Necronomicon ou immeuble à revenus, entre 18h00 et 18h05. Merci. Prière de ne PAS appeler aux 456-7867 (cause : fin du monde + avalanche d'oiseaux morts) 

bIeNveNuE À La ClInIquE dU RaSoIR !!!!

BULLETIN SPÉCIAL : 300 TRUITES S'ENVOLENT
"C'est arrivé tellement rapidement" de dire une Sylvie Frappier estomaquée et âgée de 18 ans. "J'ai beaucoup pleuré" nous raconte un homme qui ressemblait étrangement à un figurant dans un film inconnu que je n'ai pas vu. "C'est une catastrophe : Que devient le poisson dans notre monde contemporain ?!?" demandait une branche de boulot qui se faisait allègrement scier par deux ortho thérapeutes unijambistes répondant tous deux par le doux nom de Marcel, ce qui ne facilitait pas les communications dans leur travail de tous les jours : pompiers pigistes.... Mais bon, pour en revenir aux amphibiens... "Et bien je crois que j'ai la réponse" de rétorquer Marston Masserton, savant fou notoire... "Dans le panthéon moderne, il y a des rapports dit hiérarchiques entre les gens de divers milieux sociaux... C'est la base même du nouveau millénaire ; un siècle qui sera ultimement fondé sur les relations interpersonnelles qui y séviront. Les poissons ont seulement voulu prendre une part du gâteau alléchant, surmonté lui-même d'un délicieux (mais toxique) glaçage cosmopolite. Et ils vont de l'avant, les bougres. Les homosexuels ont fait valoir leur droit. Ce nouveau mouvement de truites anarchistes vont faire de même pour le monde des branchies !". Il est à noter que durant cet entretien fascinant, une épaisse fumée rose sortait de la narine gauche
du philosophe dément.

Un homme dans la vingtaine s'est fait finalement arrêté, même si la police provinciale du Québec n'avait que 19 mandats d'arrestation contre lui. "Les salauds" déclare- t'il. "J'avais pourtant soufflé toutes mes chandelles sur mon gâteau de fête". Une histoire à suivre.... euh... finalement, non. 

Je vous pose la question dans l'espoir non dissimulé que vous me fournissiez une réponse purement fiscale comme vous savez si bien les fabriquer (en série) dans votre magnifique hutte mérovingienne néo-rustique fabriquée à 98.5% de tendre et juteux ananas : Nous, nous avons des parapluies. Les parapluies ont les Grecs. Mais les Grecs, qu'ont ils pour se protéger efficacement contre ces éruptions volcaniques pourtant si fréquentes ? 

Des mocassins. D'infects... d'horribles mocassins (en cuir véritable.) Juste la mention du mot "mocassin" lui donnait des reflux gastriques puissant. Les fourmis mouraient autour de lui (à une distance de 5 mètres de diamètre) lorsqu'il le prononçait à voix haute. Joe Gacy en entendrait parler à coup sûr... si seulement il existait.


Keiji Haino, Makoto Kawabata & Tatsuya Yoshida

FREE IMPROV ÉPIQUE DE MALADES !!!


Un nuage, passant au dessus de ma tête, est mort ce matin.... ("Milk-Man vs. The Unknown...")



 -Une histoire écrite spécialement pour les pieuvres-



UNO

Dans la chambre de mon laitier, les livres étaient couchés; côte à côte. Celui qui se retrouvait en ces lieux occultes pouvaient lire avec effroi des titres de bouquins tels que l’Art de la vengeance : volume 8, Comment supprimer une famille entière avec une paille en plastique et un bout de ficelle et Histoire complète de la pasteurisation laitière : une révolution. L’homme dans la fin quarantaine avait deux passions qui lui dévoraient l’âme à grandes croquées : les produits laitiers et la haine de la race humaine.

Cet être érudit, aux os rendus quasi indestructibles par l’apport quotidien de calcium dans son entité corporelle, avait un vice des plus odieux : le crime. Frustré de voir son métier ridiculisé par la populace indigne, il avait décidé de jouer les justiciers nocturnes et de semer une terreur lactée sur la ville endormie.

Le jour, il n’était que Jules Carpentier ou « monsieur le laitier » pour les centaines d’enfants ricaneurs qu’il croisait sur son parcours du dimanche… Mais une fois la nuit venue, il se transformait en MILK MAN™, le terrifiant hors-la-loi armé de ses berlingots explosifs et de son pistolet à crème 35%. Ce renégat perfide dévalait les rues de Trois-Rivières dans sa fidèle Dairy-mobile (une Pony 1987 adaptée) et assaillait tous ceux qui osaient se mettre dans son chemin, leur offrant à tous et à toute un milkshake deux saveurs : vanille et MORT. Cinq personnes avaient tragiquement perdu la vie en osant affronter cet être surhumain, drapé d’un horrible costume de cornet de crème glacée et d’une cape tissée uniquement de tranches de fromage jaune orange.

Cet effroyable génie du mal s’apprêtait à rencontrer un adversaire à sa taille lors de cette nuit funeste d’Halloween 2008. Mais ça, il ne le savait pas encore…



SKIP-BO

Complètement défoncé, le jeune Gratien Picard titubait de trottoir en trottoir, errant tel un cadavre animé dans la ville. Il était trois heures du matin. Revêtu d’un habile accoutrement de viking, Gratien revenait d’une fête déguisée bigrement arrosée. Un peu trop d’ailleurs. Il avait beaucoup de difficulté à se souvenir de ce qui s’était passé lors de sa soirée, juste qu’il avait perdu la carte quand Loïc avait mis « Downward Spiral » de groupe américain Nine Inch Nails dans sa chaîne audio. Aux premières notes métalliques de « Mr. Self-Destruct », Un « trash » retentissant avait sévit dans le salon de Loïc, qui aurait probablement beaucoup de misère à expliquer la cause de toute cette destruction mobilière gratuite à ses géniteurs adorés qui ne savaient rien de l’existence de la dite fête en question.

Gratien contempla sa main droite. Une plaie peu ragoûtante fixait son regard embrumé. Quelques jours auparavant, notre ami avait été mordu par un gigantesque écureuil au regard méchant alors qu’il était en train de faire une petite ballade sur l’île Saint-Quentin. Et il avait mordu fort le bougre. La blessure saignait légèrement, et autour, on pouvait voir de vilains poils roux qui formaient un cercle régulier.

Alors que le jeune homme inspectait ces développements physiques insoupçonnés, une bagnole toute rouillée dévala la rue sur laquelle il se trouvait et la happa de plein front. Gratien alla s’écraser à travers une cabine téléphone qui se trouvait à sept mètres de là. Bref, le genre de choc qui laisse l’humain moyen dans une condition de décès avancé.


L’horrible Milkman sortit de son engin de mort et éructa d’un rire quelque peu machiavélique. Il marcha à grands pas vers la cabine pour aller constater l’étendue du massacre dont il était l’auteur. À mi-chemin, il entendit un rugissement aigu semblant venir d’outre-tombe. Il s’arrêta et constata avec effroi que les décombres de la cabine se soulevaient grotesquement. Agrippant son fidèle pistolet d’une main chancelante, le laitier s’apprêta à tirer sur la chose qui avait poussé ce cri immonde. Il n’eut pas le temps : un gigantesque et démoniaque écureuil de plus de quatre mètres se jeta sur lui, lui arrachant une partie de son masque et toute la joue gauche au passage.

Ça faisait vraiment très mal et en plus, ce n’était réellement pas beau à voir (on pouvait apercevoir la maxillaire supérieure ressortir par le trou). Mais notre sympathique laitier n’était pas au bout de ses peines. Écroulé de tout son long dans la rue, Milk Man leva la tête et constata que le monstre pileux s’attaquait maintenant à une autre part de son anatomie : sa jambe droite. L’écureuil prit une large « croquée », broyant la chair et les os comme si c’était de vulgaires brindilles. Une fois la quasi-totalité de la jambe consommée, la créature déchira le ventre de sa proie, faisant ressortir par le fait même les tripes et boyaux qu’il se mit à déguster comme de délicieux spaghettis. Tout ce carnage sanguinolent entraînait des hurlements de douleurs assez compréhensibles chez notre renégat lacté.

Après s’être délecté des entrailles du dangereux criminel, l’écureuil se leva d’un bond agile et sembla quitter les lieux, laissant Milk Man gisant dans une énorme flaque de sang, entre la vie et la mort. Ce dernier, à demi inconscient, pensait à tort que ses malheurs prenaient fin jusqu’à ce qu’il entende le moteur de la Dairy-mobile ronronner sournoisement…

La voiture fonçait droit sur lui ! La dernière chose qu’il vue fut la visage énorme et souriant de l’écureuil dans le rétroviseur du véhicule. Une roue lui passa directement sur la tête, aplatissant vulgairement son crâne comme une crêpe bretonne et faisant sortir toute la matière grise par le nez, la bouche et les orbites. La voiture fit volte-face et roula sur le cadavre mutilé du laitier à plusieurs reprises, tapissant la chaussée d’hémoglobine et de membres disparates. Le tableau avait de quoi faire vomir le plus stoïque des nécrophiles.

Lorsqu’on appris les exploits héroïques du nouveau justicier de Trois-Rivières, Yves Lévesque organisa une assemblée publique pour remercier l’écureuil au nom de la ville. Devant tous les médias régionaux et une foule en délire, notre héros dévora monsieur Lévesque et fut nommé nouveau maire de notre glorieuse cité.

Depuis ce jour, la paix règne à Trois-Rivières et les enfants n’ont plus peur de savourer leur portion quotidienne de produits laitiers (tel que recommandé par le guide alimentaire canadien).

C’est tout pour cette histoire, les amis ! N’oubliez surtout pas de vous brosser les dents et de prendre vos vitamines le matin ! 

FIN


mardi 19 janvier 2010

Top 2009 - L'année musicale en 30 disques



2009 is gone, my friends. Et à travers cette fin de décennie kaléidoscopique, secouée par des remous aigres-doux, il y eu des disques délicieux, mirifiques, somptueux... dans lesquels il fait bon s'aventurer, s'éblouir, se perdre... Voici, sans plus tarder, le top des meilleurs albums de 2009 !

1. BROADCAST & THE FOCUS GROUP - Investigate Witch Cults of the Radio Age (Warp)

Broadcast nous revient enfin... ou plutôt, nous envoie une transmission diablement surréalisante de l'ailleurs indomptable qui les abritent maintenant... Un ailleurs vertigineux, teinté de couleurs impossibles et de milles et uns voiles ténébreux. Brume cervicale à l'état brut... Trame sonore non-officielle de Nadja d'André Breton ou du scénario incomplet d'un autre film de vampires jamais tourné par Jean Rollin (se déroulant cette fois sur la Lune de Méliès). Des images fantasques de The Wicker Man, Suspiria et Valerie and her Week of Wonders se succèdent rapidement à travers le déluge sonore gustatif... Une post-pop 60s baroque et déstructurée qui abrite d'innombrables spectres hallucinogènes (fumez des fantômes et vous gouterez au nirvana !). Cinématographie sonore bouillonnant de références et de concepts abscons et illimités. Psychédélisme bon enfant et patchwork électro-kaléidescopique foutraque... Les deux frérots de Boards of Canada se promenant dans un vaste champ et faisant un palmarès des plus beaux épouvantails qu'ils rencontrent (et saluent) sur leur route. Flashbacks de tous tes costumes d'Halloween.... Un vieux documentaire de la BBC sur les sables mouvants... Lucio Fulci portant de ridicules bretelles bleu ciel et filmant des fourmis mortes avec une caméra qui n'arrête pas de changer de forme (mais est-ce vraiment une caméra ? Ou plutôt une boîte de Pandore ? Ou une toupie russe gigantesque ? Qui sait ?)

2. LEYLAND KIRBY - Sadly, The Future Is No Longer What It Was (History Always Favours The Winners)

Ce mec est un génie. Après un Persistent Repetition of Phrases aussi émouvant que mystérieux, Leyland Kirby alias The Caretaker continue ici son constat onirique sur la mémoire et l'oubli... Ce coffret de trois disques, objet matériel, propose pourtant l'immatériel : une musique pour se perdre, une musique qui se perd magnifiquement en elle-même... sans réel début, sans fin. C'est déjà commencé quand vous appuyez "Play". Ce que vous entendez, c'est le travail insolite d'un transistor magique qui ne fait que retranscrire la quatrième dimension (le temps qui file, impitoyablement) sous le langage des sons... Et la boucle du temps, ça sonne comment ? Comme du dark-ambient surréaliste qui s'écoule avec délice dans le tympan des aventureux... comme une érosion sonore divine parsemée de notes de piano évoquant un croisement entre le thème des "Feux de l'Amour" et une Gymnopédie d'Erik Satie... Comme une pluie de poussières cosmiques voletant à travers le filtre d'une musique indéfinissable, une musique à la fois belle, nostalgique, tragique et hantée, à mi-chemin entre Angelo Badalamenti, Philip Jeck, Boards of Canada, Wendy Carlos et William Basinski. Un album qui clôt magnifiquement cette décennie musicale. Et tu retourneras poussière...

3. MOUNT EERIE - Wind's Poem (P.W. Elverum & Sun - Creators / Destroyers of Music)

La musique de Phil Elverum a toujours été empreinte d'un profond désespoir... le genre de désespoir qui vous réveille la nuit et vous arrache un océan de larmes. Wind's Poem prend ce désespoir qui, d'albums en albums, grandit chez Mount Eerie, et l'asperge d'une terreur sourde et brute. Alliant la rage nouvelle du Black Metal (ou plutôt : SA vision du Black) à la tristesse de son folk intimiste, Phil réussit à donner naissance au chapitre le plus cauchemardesque de son autobiographie musicale en constante évolution. Sa voix, faible et résignée, est parfois ensevelie par un ouragan de dissonance électrique. Le résultat est, pour le fan de Microphones ou Mount Eerie, proprement stupéfiant. Et le fan de Twin Peaks en moi se trouve aussi séduit par la reprise d'un des thèmes clés de la série sous la forme de "Between Two Miseries".

4. FEVER RAY - Fever Ray (Mute)

Un autre album lynchien (le troisième en ligne) ! Projet solo de Karin Dreijer Andersson, chanteuse (ex ?) du génial duo The Knife (avec son frérot), Fever Ray se révèle à nous comme une entité beaucoup plus sombre et torturée. On reconnaît tout de suite les milles et une voix de Karin mais elles sont maintenant accompagnées d'une musique beaucoup plus éthérée, une genre de pop-dance gothique infusée d'atmosphères surréelles, de mélancolie nordique et de percussions tribales. Fever Ray, c'est le triomphe d'une des meilleurs chanteuses pop des dernières années (voir tous les albums de The Knife et ses contributions aux albums de Röyksopp) qui réussit à prouver ici qu'elle est une artiste totale, autant du point de vue de la composition que de la production. Comme beaucoup de mes albums préférés, toute la magie cachée de Fever Ray s'est révélée à moi au fil des écoutes, nombreuses. Cet album est un labyrinthe infini où s'enchevêtrent textures hypnotiques et ambiances noctambules. Un album à savourer la nuit.

5. JIM O'ROURKE - The Visitor (Drag City)

Le grand retour du roi de la pop symphonique et ce, après des années de noise, de minimalisme nippon, de drone ambient, de délicieux covers des Spice Girls et de bidouillages sonores diverses auprès de Sonic Youth, Wilco, Nurse With Wound, Merzbow et Joanna Newsom (monsieur touche à tout). Jim O' Rourke can do no wrong, folks. Et ce, peu importe le style. Mais moi, ce que je préfère chez lui, c'est sa série d'albums pourtant chacun le titre d'un film de Nicolas Roeg (à quand Don't Look Now ? J'en frissonne déjà d'envie).

Avec ce Visitor, O'Rourke renoue avec les atmosphères des géniaux Eureka (1999) et Insignificance (2001) mais nous livre cette fois-ci un album purement instrumental qui se résume à une seule pièce de 38 minutes. Et ce sont 38 minutes de pur bonheur qui semblent en durer 1 et demi ! Il est donc essentiel de foutre le tout en mode repeat parce que c'est juste trop court, trop beau, trop bon, trop parfait, trop trop... Et c'est possiblement l'album que j'ai le plus écouté cette année. À travers cette suite art-pop-folk-baroque digne du splendissime Song Cycle de Van Dyke Parks, le maestro flirte autant avec le folk cyclique (d'inspiration reichienne) d'un Sufjan Stevens et les cordes hypnotiques d'un John Fahey. Les ambiances feutrées se dégageant de l'œuvre semblent appartenir à un folklore mystique et fusionné... S'amalgament en un tout cohérent les relents d'Americana et les sonorités japonaises (le Japon étant le pays d'adoption de Jim). Le tout est recouvert d'une aura particulière, très "mélancolie-joyeuse", très éthérée et très sixties aussi... Du genre : les Beach Boys enregistrant Smile version karaoké au pays du Soleil levant et ce, pendant que Nick Drake "mixe" sa symphonie folk improbable dans une autre pièce du même studio... En bref, écouter The Visitor, c'est comme recevoir une carte postale d'un ami cher qu'on a pas vu depuis longtemps... la lire et la relire encore et encore, jusqu'à ce qu'elle devienne musique...

6. ANIMAL COLLECTIVE - Merriweather Post Pavilion & Fall Be Kind (Domino)

 

Vous ne pensiez toujours pas que j'allais oublier les chouchous de l'année (et accessoirement le groupe de pop qui, selon moi, définit le mieux le 21ème siècle jusqu'à maintenant, ce qui n'est pas peu dire) ?!? Le collectif animalier a magnifiquement roulé sa bosse à travers toute la décennie. Ils étaient deux au départ, chantant naïvement des chansons de feux de camps avant de décider de faire beaucoup de bruit tout en se prenant pour les Boredoms américains. Ils ont ensuite agrippé leurs guitares acoustiques le temps d'un hiver psychédélique ponctué d'incantations tribales (We TIGERS !!!). De nouveaux arrivants se sont joint au collectif qui, fort de ces acquisitions, a concocté un petit chef d'œuvre d'indie-rock déstructuré où l'on retrouve aussi ces envolées minimalistes si sympathiques qui sentent bon le LSD. À travers tout ça, ils ont même eu le temps d'aller prendre le thé chez mam'zelle Vashti, se laissant bercer par sa voix enchanteresse et l'écho d'un vent lointain (et doux). Puis vint ensuite une avalanche de confiture hallucinogène, engluant magnifiquement une électro-pop devenue maximaliste et détruisant tout sur son passage. À travers toute cette dangereuse épopée, les membres d'Animal Collective étaient comme habités par l'esprit désincarné du Brian Wilson de l'époque Smile (celui qui n'est jamais vraiment revenu sur Terre). Brian veillait sur eux, le sourire en coin et son fidèle casque de pompier sur la tête.

Finalement, nous voilà là... avec ce "Merriweather" jouissif et ce "Fall Be Kind" orgasmique. Le succès commercial a finalement cogné à la porte de nos amis et ce, fort heureusement, non pas au détriment de la musique, qui, bien qu'elle se trouve à son état le plus accessible à ce jour, demeure toujours aussi belle que folle. "Girls" est la toune de l'année, ni plus ni moins. Un genre de quasi-Rn'B rétro-spatial qui te prend directement par les tripes et qui te donne le goût de sourire-sourire-sourire-et-puis-danser-sans-arrêt (youp la boum !). "In The Flowers", c'est une des plus fortes entrées en matière de l'histoire de la musique moderne. Une giclée d'étoiles multicolores en pleine gueule ; si vous me pardonnez l'expression. Et il ne faut pas oublier la ballade romantique la plus enfantine et pure de la décennie, "Summertime Clothes"... tout comme le mantra tribalo-moderne insensé qu'est "Brother Sport" (à chanter à voix haute tout en faisant du ski de fond à poil) ou bien encore "Graze" qui raconte les aventures FAN-TAS-TIQUES du cosmonaute Zamfir et de sa flûte  de Pan atemporelle dans les méandres de la galaxie QUITJILKVOT. Et je pourrais continuer encore longtemps parce que tout est délicieusement bon sur cet album et cet E.P.

Reste à voir ce que nous réservent le Collectif Animalier lors de cette prochaine décennie qui ne fait que commencer. J'en bave déjà d'extase.

7. MAGMA - Ëmëhntëhtt-Ré (Seventh)

Il y a des groupes qui ne sont géniaux qu'un moment, le temps d'un ou deux albums, et qui implosent ensuite dans la nuit des temps ou qui se mettent tout simplement à faire de la musique minable... Il y a aussi des groupes qui se réinventent, évoluent au gré des saisons, se laissant influencer par les nouvelles tendances et essayant de se les approprier dans une musique qui leur est toujours propre (certains s'y perdent aussi)... Il y a des groupes qui n'évoluent pas, bons ou mauvais. Il y a des groupes qu'on adore, qu'on déteste et puis qu'on adore à nouveau (ces fameux "comebacks" si rarement réussis)... Et puis il y a LE groupe. Celui qui, dès son premier album (en 1970), livre une musique qui est encore complètement d'avance sur notre bon vieux nouveau millénaire... Le groupe parfait et génial dont la musique évolue magnifiquement d'album en album mais de manière consciente... pour servir la cause du concept amené et l'histoire fantastique qu'elle soutient... Le groupe qui possède un univers tellement unique et particulier que ses membres ont inventé une langue qui lui est propre... Un groupe dont la musique, peu importe l'album, peu importe la date d'enregistrement, est irrévocablement intemporelle... Un groupe qui réussit à marier Free Jazz, Opéra, Prog, Psychédélisme, Littérature et Philosophie pour en faire une œuvre d'art totale... Un groupe dont l'architecte mi-fou, inventeur de mondes, dévot de Coltrane et Wagner, demeure tout simplement le meilleur batteur de tous les temps (même à 62 ans !)... Cet architecte est Christian Vander et son groupe (LE groupe) est MAGMA !!!!

Après cette lettre d'amour au plus grand groupe de tous les temps, que vous dire d'autre que ceci : Ëmëhntëhtt-Ré est un autre chef d'œuvre étonnant, mystifiant, saisissant, remarquable, rocambolesque et toutes ces sortes de choses ! Cet album clôt la superbe trilogie commencée par K.A (paru en 2004) et Köhntarkösz (1974) de la manière la plus sauvage et belle qui soit.

8. SUNN O))) - Monoliths & Dimensions (Southern Lord)

Les paysans du coin disaient que la vieille église abandonnée n'était plus un lieu sacré... qu'un mal millénaire, enfoui au tréfonds de la Terre, s'était emparé d'elle et l'avait recouverte de ses ténèbres indicibles. Amusé par ces ragots, j'empruntai un matin de Novembre la vieille route cahoteuse qui y menait. La grisaille infinie d'un ciel funeste et impie me recouvrait entièrement. Pas âme qui vive dans les parages. J'étais seul... impitoyablement seul. Seuls les gémissements insolites d'un vent glacial envahissaient mes tympans, semblant m'annoncer un éventuel déluge... La neige, tout comme la nuit, commençait à tomber lorsque se dressa enfin devant moi le bâtiment tombant en ruines...

Lorsque j'entrai dans la demeure du Malin, je fus secoué par les incantations nauséeuses des druides déments... Visiblement en transe, ils ne se souciaient pas de ma présence. L'église était un foutoir immonde... Statue du Christ étalée sur le sol poussiéreux, vitraux éclatées, bancs retournés dans tous les sens et icônes désacralisées (les yeux des personnages bibliques étaient noirs comme la suie)... Un tremblement sonore infâme me tira alors de mon état de consternation et me projeta alors dans l'horreur la plus absolue... Les druides aux visages impassibles s'étaient emparés d'instruments diverses et s'activaient à créer une anti-musique démoniaque.... aussi lente que perfide... Des cadavres animés sortirent alors d'un trou circulaire énorme, sorte d'immense tombeau creusé à même le sol de l'église... Commença alors une symphonie apocalyptique, portée par le chant des moribonds et le drone irréel des cordes possèdées... C'était comme une lente et pénible agonie... s'emparant tranquillement de votre âme et vous laissant comme paralysé... Je fermai les yeux devant le spectacle obscène mais à travers la musique, je POUVAIS VOIR.... Les cuivres se dressèrent et se portèrent aux lèvres putrides de ceux venus d'ailleurs... La voix des religieuses mortes depuis des siècles vinrent s'enchevêtrer à la mascarade infernale... J'ENTENDAIS LES MOUCHES VOLER.... JE SENTAIS L'ODEUR PUTRIDE DE MA PROPRE MORT... JE....

Lorsque je repris connaissance, c'était le petit matin. J'étais seul dans l'église. Je m'approchai de l'autel. À sa droite se dressait un grand miroir... En y contemplant mon reflet, je n'y vis que démence insensée... mes cheveux étaient d'un blanc vaporeux, des rides caverneuses défiguraient mon faciès et mes yeux... mes yeux n'étaient que trous noirs infinis... ouvrant la porte vers le néant indomptable...

9. DEMDIKE STARE - Symbiosis (Modern Love)

Voilà donc un album des plus singuliers... Demdike Stare, c'est le projet de deux types, l'un fondateur de l'excellent label Finders Keepers (responsable des rééditions de Jean-Claude Vannier, Vampires of Dartmoore, Jean-Pierre Massiera et de la trame sonore épique de Valerie and her week of wonders) et l'autre maître dans l'art du techno-dub minimal. Et qu'est-ce que ça donne ? Un album intemporel, aussi noir qu'une nuit sans lune, oscillant entre dubstep brumeux (à la manière de Burial, référence en la matière), drone mystérieux, techno vaporeux et bande son fictive de Film Noir enfumé ou de Giallo oublié par les temps.

Le son de Symbiosis est glacial, sombre et dense mais comporte aussi son lot d'influences disparates et éclatées. Extraits de trames sonores bollywoodiennes, de divagations aux claviers à la sauce Goblin et d'albums psychédéliques turques s'entremêlent dans le malaxeur magique des deux compères. Ces derniers combinent le tout et réussissent vraiment à créer des atmosphères, des mélodies et des beats uniques, abstraits, hypnotiques... Leur démarche musicale va résolument au delà du dubstep actuel. S'en résulte une des écoutes les plus subliminalement jouissive de tout 2009. 

10. EVANGELISTA - Prince of Truth (Constellation)

Elle continue d'errer dans un brouillard épais... Déclamant ses peurs, ses joies, sa souffrance, ses cris et sa folie au vide... Accompagnée de ses sombres acolytes, druides musiciens, qui définissent magnifiquement le chaos qui l'entoure, y allant de leurs cordes désespérées, de leurs dissonances guitaristiques, de leurs cymbales cristallines et de notes de piano ou d'orgue atmosphériques... Ballades hantées, avant-prog du tombeau, Jazz funèbre, bad trip de country-rock acide, ambient surréaliste... Impossible de qualifier réellement cette musique... Carla Bozulich continue d'avancer vers un vertige encore plus authentique... touchant, avec grâce, à ce néant indomptable où se perdent les PJ Harvey, Scott Walker, Sunn O))), Ligeti, Sun Ra et Grouper de ce monde...

11. NATURAL SNOW BUILDINGS - Shadow Kingdom (Blackest Rainbow)

 

Quelle découverte incroyable fut pour moi la musique de ce groupe français ultra-underground tard en fin d'année ! Ce duo existe depuis la fin des années 90 et produit des tonnes d'albums ultra-limités (des fois à une dizaine de copies seulement !) pratiquement à chaque année. Une de leur sorties de 2009, Daughter of Darkness est un coffret de 4 cassettes audio remplies à foison (6 heures de matériel !!!). De mon côté, j'ai découvert le groupe avec The Dance of the Moon and the Sun (2006) et ce fut le coup de foudre instantané. J'ai réussi, au terme de biens des efforts, à me procurer leur dernier album en date, Shadow Kingdom. Et c'est de la bombe.

Il y a tout ce que j'aime dans cette musique : du folk psychédélique, du drone ambient, des passages post-rock atypiques qui sonnent A Silver Mount Zion version "ensemble de musique de chambre médiévale" , un soupçon de prog par ci par là, beaucoup d'improvisation, une atmosphère irréelle, des field recordings, des chansons plus conventionnelles (belles à pleurer) et des titres de morceaux évoquant H.P. Lovecraft, les auteurs surréalistes et les vieux films d'épouvante.

L'album contient deux CDs et vient avec une bande dessinée sur les vampires !!!

12. LLOYD MILLER - A Lifetime In Oriental Jazz (Jazzman)

Sublime compilation couvrant la fascinante carrière d'un des maîtres injustement méconnus du jazz expérimental : Lloyd Miller. Multi-instrumentiste de génie, Miller fut un grand défricheur de musiques orientales (autant iraniennes que vietnamiennes ou indiennes) de même qu'un des pionniers dans l'art de juxtaposer ces musiques à un Jazz riche et bouillonant d'idées. Je dis bien  "juxtaposer" et non "fusionner" parce qu'à travers sa démarche artistique, Miller ne voulait pas dénaturaliser le moindrement ces traditions musicales qu'il vénérait. On navigue donc ici en plein folklore turque et perse, porté dans la beauté du oud, du santûr (sorte de cithare sur table) et du zarb (tambourin perse)... et alors que s'installe une atmosphère de délice planant, viennent se greffer à ces piécettes oniriques des instruments appartenant au monde du Jazz (contrebasse, piano, cuivres). L'osmose entre les styles est parfaite, naturelle et renversante. Une  des plus belles découvertes de l'année.

13. CURRENT 93 - Aleph at Hallucionatory Mountain (Coptic Cat)

Un nouvel album de Current 93 est toujours un événement traumatique en soi. Depuis Nature Unveiled en 1984, David Tibet et sa bande toujours changeante de joyeux psychopathes évoluent dans un créneau tout à fait à part : la fin des temps mise en musique... Et avec cette dernière offrande où la poésie cryptique d'un Tibet possédé s'enchevêtre parfaitement à un rock psychédélique lourd et acide, Current 93 réussit pleinement à dépeindre l'apocalypse dans toute sa magnificence et toute son horreur... À l'écoute de cette œuvre désolée, de ces guitares et ces claviers vieillots qui pleurent leur hargne, de cette voix de gnome décharnée qui scande des missives damnées, teintée de références littéraires et d'images surréalistes, on se sent devenir tout petit devant ce malaise monstrueux qui nous envahit l'âme et les tripes. Et je crois qu'il faut beaucoup de talent pour créer un tel effet chez l'auditeur... Aleph est la bande son idéale du Nyarlathotep de Lovecraft.

14. DIAMATREGON - Crossroad (tUMULt)

L'album de Black Metal de l'année. Puissant, extrême, sombre, torturé, inquiétant, progressif, malsain, psychédélique, évolutif, hypnotique, Crossroad se veut un hommage onirique au Blues et à cette "croisée des chemins" légendaire où Robert Johnson aurait vendu son âme au Grand Cornu pour devenir le Roi du "Delta Blues"... Un sombre joyau qui révèle ses forces et sa complexité au fil des écoutes, passionnantes. 

15. DAVID SYLVIAN - Manafon (Samadhisound)

Magnifique parachèvement d'une carrière musicale basée sur l'épuration. Beaucoup moins schizophrénique que Blemish mais encore plus abstrait et minimal. La musique n'est qu'atmosphère divine recouvrant la voix du poète (je crois que nous pouvons l'appeler ainsi).

16. KRENG - L'Autopsie Phénoménale de Dieu (Miasmah)

Une musique de rêve et de cauchemar... Un disque qui fait très "Sentiers Insolites"...  Du Dark Ambient teinté de jazz et dont l'atmosphère générale carbure au surréalisme dans sa forme la plus brute. Le tout est entrecoupé d'extraits de films-noirs, de "field recordings" bizzaroïdes et de musique concrète... Imaginez le Kammerflimmer Kollektief improvisant la trame sonore d'un film d'horreur de Bunuel et vous aurez une bonne idée de la musique spectrale de Kreng. 

17. GRIZZLY BEAR - Veckatimest (Warp)

Si j'avais un foyer, une chaise berçante, une pipe et une robe de chambre, ce serait mon album de "foyer-chaise berçante-pipe-et-café" préféré. Ce disque veut te raconter des histoires, te bercer, te cajoler, t'envouter, t'endormir (dans le bon sens du terme). Ce disque est habité par une sorte de "bonheur calme" qui fait si bon à l'âme.

18. THE FLAMING LIPS - Embryonic (Warner Bros.)

HOLY SHIT !!! Quelle surprise que cet album ! Après un album aussi doucereux (et pourtant savoureux) que At War With The Mystics, je ne m'attendais pas à un album aussi "fucked-up" de la part de nos adorables lèvres brûlantes. Embryonic, c'est une longue suite de jams alambiqués, de délires violents et instantanés à la sauce quasi kraut-rock, de prog dadaïste, de ritournelles tristounettes et psychédéliques... Le meilleur Flaming Lips depuis Soft Bulletin. 

19. MOUNTAINS - Choral (Thrill Jockey)

Le disque automnal par excellence de 2009. De la sculpture sonore à l'état brut... Du beau suspendu à l'infini... submergeant tout sur son passage et le teintant de sa couleur divine... le ciel, la forêt aux feuilles tombantes, l'après-midi chancelant, la lumière du Soleil décroissant à travers les branches mortes, l'horizon transpercé d'effusions nocturnes... De l'ambient ensorcelant qui se construit lentement, à la faveur de guitares folk mystiques, de la chaleur analogue de vieux claviers, de la mélancolie pure du piano... le tout hanté par le spectre du shoegaze et ponctué de merveilleux passages où tous les instruments se fondent en un mur de son vertigineux, sorte de noise bienveillante et émouvante... Un disque à écouter très très fort sur son I-Pod en admirant la nature environnante mourir petit à petit, somptueusement... 

20. DINOSAUR JR. - Farm (Jagjaguwar)

Dino poursuit son sublime retour en forme avec ce Farm encore plus génial que leur Beyond de 2006. C'est comme si on était en 1990 à nouveau, man (bien que j'avais seulement 5 ans en 1990 et que j'écoutais plus mes cassettes audio de Passe-Partout que Dinosaur Jr. ou Sonic Youth). Mon disque Rock de l'année. Celui que je fous dans la stéréo quand j'ai envie de boire 5-6 bières tout en faisant du "air guitar" (imitant l'incroyable J. Mascis).

21. HILDUR GUDNADOTTIR - Without Sinking (Touch)

Une violoncelliste voulant mettre l'eau et les nuages en musique... Une musique de film sans personnages, où la nature EST le personnage... Où l'instrument classique se mêle aux méandres de l'ambient, du post-rock, du minimalisme... Dur de parler d'un disque aussi épuré, aussi beau, aussi immersif, aussi émouvant... Je n'ai qu'une chose à dire : écoutez-le, qui que vous soyez, et pendant 50 minutes, vous quitterez ce monde. I Promise.

22. A FOREST OF STARS - The Corpse of Rebirth (Transcendental Creations)

Se surnommant eux-mêmes The Gentleman's Club A FOREST OF STARS, ce groupe du Royaume-Uni créé un Black Metal aussi progressif que atmosphérique. Porté par les effluves violonesques d'une Katheryne Stone (membre des légendaires My Dying Bride) touchée par la grâce, The Corpse of Rebirth est l'album de Black le plus "anglais", le plus noble et le plus victorien que j'ai jamais entendu... Quel autre album de Black comporte une pause-thé en plein milieu ?!? 

23. BLACK TO COMM - Alphabet 1968 (Type)

Je comprends pas... J'étais chez moi, peinard... Je buvais ma Tremblay et j'ai mis un disque... Et là, je me suis retrouvé dans les airs (moi qui ai le vertige d'habitude), flottant par-dessus une forêt de conifères extra-terrestres (z'étaient d'un bleu très profond et ça scintillait de milles feux argentés), parcourant des corridors inter-galactiques emplie d'une neige cosmique... Elle n'était pas froide... Elle était juste irréelle. C'était comme si la lumière d'un astre mi-Soleil mi-Lune s'était transformée en gros flocons qui m'arrivaient à la gueule par bourrasques impossibles. Sentiment d'étrangeté profonde. Tout était comme au ralenti, comme magnifié par le filtre de mes pensées absentes... J'errai dans cet unhivers qui n'a jamais existé, allant d'extase en extase... et puis j'ouvris les yeux... et m'ouvris une autre bière.

24. BLUES CONTROL - Local Flavor (Siltbreeze)

Il fait Soleil. C'est l'été. Le Soleil est mauve en fait. Et il pleut des confettis. En feu. Et dans un grand parc où un gazon millénaire se berce au gré d'un vent chatoyant, un grand pique-nique amical se déroule. Sont réunis des membres de Neu!, Suicide, The Stooges de même que quelques musiciens de Sun Ra (pourquoi pas). Tout en bouffant des sandwiches à la mortadelle et en se buvant du vin d'une qualité douteuse, nos comparses s'amusent à créer une musique géniale et ridicule (ou génialement ridicule) avec l'aide d'un Casio et d'une couple de tam-tams électriks. S'ensuit une orgie. 

25. BEN FROST - By The Throat (Bedroom Community)

Electro-Minimal-Cinématographique. Une musique qui veut t'ensorceler et t'oppresser en même temps, chaleureuse, glaciale, vorace, mystérieuse, nostalgique. Dracula s'achète une maison de campagne à Twin Peaks. Les loups électriques de tes cauchemars déferlent par milliers sur la lande... Ils s'approchent. Tu le sais. Tu as peur. Et tu adores ça. 

26. ONEOHTRIX POINT NEVER - Rifts (No Fun)

2 CDs remplis d'angoisse délavée... Écouter Rifts, c'est comme se retrouver à l'intérieur d'un Nintendo dépressif. Ou plutôt de laisser William Basinski remixer la trame sonore de Final Fantasy Adventure au Game Boy. Au menu : litanies 8-bit austères et hypnotiques, drones abstraits et sinistres (à Boards of Canada époque Geogaddi), mélancolie électrique et scintillante... 

27. COLD CAVE - Love Comes Close (Matador)

Le disque le moins viril de l'année et (peut-être) le plus stupide. Un (autre) détour inutile dans le vide artificiel des eighties, de la New-New-New-Wave et du Post-Synth-Pop froid-&-robotique façon Kraftwerk... Un autre chanteur qui se prend pour Ian Curtis et qui pleure tout son désarroi sur un seul ton... d'autres claviers rescapés d'une tournée avortée de New Order... Et pourtant... pourtant... J'aime cet album. Beaucoup. Il y a ce petit côté lo-fi qui rend le tout savoureux... Il y a quelque chose dans le son qui transforme son kitsch indéniable en un univers onirique où "sur les arbres mourants poussent maintenant des émotions"...

28. NICK CAVE & WARREN ELLIS - White Lunar (Mute)

Superbe compilation de morceaux tirés de différentes bandes sonores du grand cru de nos deux lascars : l'incroyable Nick Cave (mister Bad Seed en personne) et son acolyte Warren Ellis, violoniste des Dirty Three. On le sait déjà : Assassination of Jesse James possède une des bandes sons les plus magnifiques de tous les temps et The Proposition n'est pas à plaindre non plus. Mais le 2ème CD, plein de matériel un tantinet plus obscur, est tout aussi génial.

29. MONOLAKE - Silence (Imbalance)

Minimal Techno. Dub. Glace. Froideur. Minimal. Cérébral-Musik. Vent Cosmique. Écoute au Casque. Recommandée. 

30. ALUK TODOLO - Finsternis (Utech)

Groupe alter-égo de Diamatregon, Aluk Todolo fait dans le mariage de styles insolites pour un résultat encore plus insolite. Nous avons droit ici à un alliage mécanique entre No Wave, Kraut-Rock, Post-Punk, Psychédélisme 60s et Black Metal. Ce second album, succédant au déjà terrible Descension (2007), fait encore plus mal. Fini le côté "rehearsal de kraut-rock satanique dans le garage de mes parents" du premier opus. Ici, tout est plus cérébral et calculé... Tout est maintenant plus froid et répétitif... Ici, il n'y a plus que cette non-musique qui évolue, sans concession, à travers le filtre des ténèbres d'une nuit sans lune... Trame sonore sur l'acide de M de Fritz Lang...

HORS-CATÉGORIE : EMILY JANE WHITE - Dark Undercoat (Important)

Album originellement paru en 2007 et réédité par l'excellent label Important Records, le premier opus de Emily Jane White est une perle noire. Du folk dépressif rempli d'amertume et de désillusion. Une voix et une guitare. Parfois du piano. Mélancolie auditive pour les journées grise et mornes. Un des disques que j'ai le plus écouté en 2009.

That's all folks !!!

Je vous invite à partager, vous aussi, vos Top 10, Top 50, Top 100 ou Top 2567 albums de 2009 !

Et, si le temps le permet (cette foutue quatrième dimension de malheur !!!!), je ferai un Top des meilleurs albums Metal de l'année parce qu'il y a eu beaucoup BEAUCOUP de bonnes sorties cette année :)))).

Ciao !